« La théologie critique est parfois intégriste »

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J’ai surpris 2–3 personnes aujourd’hui en disant sur Twitter que « la théologie critique est parfois intégriste »:

C’était suite à un éditorial de Raphaël Picon, « théologien sans être crétin », qui affirme que la théologie critique est la solution raisonnable aux intégrismes religieux. Ayant étudié dans 5 facultés de théologie réformées, dans 3 pays et sur 2 continents, j’ai entendu chacun insulter les autres en les traitant respectivement de « fondamentalistes » et de « libéraux », ce qui m’a poussé vers l’épistémologie pour essayer de mieux comprendre les tenants et aboutissants. Et qui m’a fait découvrir que la « critique » est, finalement, une tradition parmi d’autres.

Un des auteurs qui m’a le plus nourri dans cette réflexion, et sur lequel j’ai fait mon travail de mémoire, est Michael Polanyi. Ce penseur hongrois propose ce qui est à mon sens le meilleur dépassement des dichotomies entre le subjectif et l’objectif, la théorie et la pratique, le croire et le savoir, les fondamentalistes et les libéraux. Il développe une connaissance personnelle, c’est-à-dire une connaissance basée sur l’acte d’un sujet connaissant, habitant une tradition, et intégrant un ensemble de détails dans un tout cohérent et porteur de sens, établissant de ce fait un contact avec une réalité cachée qui se donne à connaître (limpide, n’est-ce pas?1). Il montre ainsi comment toute connaissance (en particulier scientifique, étant lui-même chimiste de profession) n’est jamais « neutre », « objective » et « détachée », mais située, engagée, portée par des valeurs, des passions intellectuelles, des choix, des intuitions. Elle est faite de risques, et engage ma responsabilité. Mais elle n’est pas subjective pour autant, en ce que la réalité me résiste, et je suis tenu d’affirmer pas uniquement ce dont j’ai envie, mais ce qui s’impose à moi: « Me voici, je ne puis faire autrement ; Dieu m’assiste ! »

Central dans cette épistémologie et contribution majeure de Polanyi à la philosophie des sciences, est la notion de « connaissance tacite », à savoir le fait que la plus grande partie de notre connaissance n’est pas, et ne peut pas être explicitée. « Je sais toujours plus que ce que je suis capable de dire. » Si ce n’était pas le cas, toute découverte serait impossible (c’est le paradoxe du Ménon de Platon).

Dans cette perspective, la critique même la plus radicale, avant d’être doute est affirmation confiante de certains éléments (puissance de la raison, efficacité d’une méthode, nécessité de certains critères, bon sens de son maître à penser). En d’autres termes, la foi précède la compréhension, en ce que je dois d’abord investir et assumer un « système fiduciaire », un ensemble d’a priori qui me semble être fécond pour comprendre l’humain et sa place dans le monde. Et la grande partie de ces a priori sont tacites.

La « théologie critique » n’échappe malheureusement pas à ces règles. Pour être critique, elle est l’affirmation de critères de pensées, de règles de raisonnements, de questions appropriées et types de réponses acceptables. Elle s’appuie sur des a priori dont certains ont une portée et une signification théologique, et a beaucoup de peine à les remettre en question. Beaucoup de peine admettre qu’en dehors des sentiers de sa tradition puissent se trouver des formes de raisonnements qui soient valables. De fait, elle évolue principalement dans une vision du monde basée sur une science dépassée. Son regard même sur le fonctionnement de la science n’a souvent pas intégré les évolutions en philosophie des sciences de la deuxième moitié du siècle passé. J’ai souffert pendant une partie de mes études de la fermeture d’esprit de professeurs « critiques » qui m’ont obligé à penser dans une boîte, et ne m’ont pas permis d’être le théologien que j’aurais voulu être. Et même quand j’ai entrepris ce travail « critique de la critique », mon prof comme l’expert n’ont pas fait l’effort ne serait-ce que d’envisager les approches que je défends (par exemple pour les sciences bibliques).

La critique est une tradition, et comme telle elle est portée en partie par des « intégristes fanatiques », soucieux de voir leur valeurs, leur catégories, leur pensée être reconnue comme la seule viable. Et dans un sens, ils sont raison: ils sont convaincus que c’est la meilleure approche, et ils la défendent. Tant mieux! Tant qu’ils laissent à d’autres le droit de penser autrement. Quand la théologie était le discours majoritaire, c’était la plus grande source d’erreur, et les Lumières ont bien fait de s’y opposer, de rejeter son autorité. Quand la « critique » devient le discours majoritaire, qui veut faire taire tous les autres, elle devient un danger pour la société, et il faut s’y opposer.

En attendant que je présente ici un peu mieux Polanyi, vous pouvez consulter mon travail de mémoire: Michael Polanyi, l’implication personnelle du sujet dans la connaissance (581Ko).

Lire aussi:
  1. Je développerai cela par ailleurs, en attendant vous pouvez consulter Une image du savoir.
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12 commentaires

  • 1. Je vais lire ton mémoire (merci LaTeX) dès que j’en trouverai le temps. Ça m’intéresse.

    2. Je trouve que le mot « critique » manque vraiment de précision. Est-ce que critique est synonyme d’  »académique » (= comme on la fait à l’université), de « scientifique » (= répondant aux critères de toute science), de « meilleure que pas critique » (= laissant moins de place que d’autres courants aux confessions de foi), etc. Il vaudrait vraiment la peine de rechercher un peu plus de précision (peut-être que tu l’as fait dans ton mémoire ou que cela existe ailleurs).

    3. Cela ne concerne pas spécialement ce billet, mais je suis étonné de voir que le qualificatif de libéral est toujours utilisé pour deux choses assez distinctes. D’une part en opposition aux évangéliques (moins de moralisme, lecture moins littérale de la Bible, etc.). De ce point de vue, la plupart des Églises réformée « officielles » est libérale. D’autre part un courant théologique du XIXe siècle, plutôt bien identifié dans sa durée et sa géographie. De ce point de vue, les Églises « officielles » ne sont absolument pas libérales et les libéraux se content sur les doigts de quelques mains. C’est dommage de ne jamais savoir ce quel libéralisme on parle.

    4. J’abonde sur ceci: « De fait, elle [la théologie académique] évolue principalement dans une vision du monde basée sur une science dépassée.  » Entendu en particulier des compréhensions de la science par des théologiens (théorie du chaos, par exemple) complètement fausses. Et plus généralement des critères dits scientifiques qui ne le sont, de loin, pas toujours.

    • Merci Nicolas, j’abonde sur tout les points!

      - J’ai utilisé exprès par moment des guillemets pour « critique », « scientifique », « objectif », « libéraux et fondamentalistes », car ces termes sont toujours utilisés de manières floues: je les ai énormément entendus pendant mes études en Suisse (un peu moins « objectif » et « libéraux », mais les autres oui), mais jamais une seule fois ont-ils été définis. Comme si il n’y avait pas besoin, parce que leur sens est connu. Par exemple « critique » est utilisé comme un mélange de: rationnel, rigoureux, intellectuellement honnête et responsable, qui ne se soumet à aucune tradition extérieure, scientifique et académique, détaché (et en retour si on devait définir « rationnel », « scientifique », « académique », etc. on utiliserait sûrement le terme « critique »). Je les utilise ici pour ce qu’ils évoquent. Mais j’ai bien sûr réfléchi à leur signification. C’est, dans un sens, l’objet de mon mémoire: le sous-titre de l’œuvre de Polanyi que j’ai étudié s’intitule Vers une philosophie post-critique.

      - tout à fait d’accord avec ta remarque sur le libéralisme. On peut faire la même sur le « fondamentalisme ». Ces deux termes sont particulièrement intéressant parce qu’ils sont utilisés comme des insultes théologiques beaucoup plus souvent que pour parler de courants spécifiques. Par exemple en suisse romande, une fois qu’on a dit qu’untel est un fondamentaliste, on a même plus besoin de le lire, comprendre, présenter: on sait que c’est une abruti conservateur avec des opinions tranchées incapable de se remettre en question. On est même en droit de caricaturer sa position, tellement on sait qu’elle est fausse. Le terme libéral peut opérer de la même manière chez des théologiens conservateurs. (Sur ce point, Plantinga a deux pages très drôles dans Warrented Christian Belief).

      - petit détail: il n’existe pas de « critères de toute science » 🙂 C’est un des mythe véhiculé fréquemment à l’université ces temps, en particulier dans les disciplines qui meurent d’envie d’être reconnues comme scientifique. Chaque science, chaque communauté scientifique, fonctionne avec des critères et des méthodes (et beaucoup de non-dits) qui sont propres à leur objet et à leur approche.

      PS: quand tu te définis comme libéral (ou mieux: « affreux libéral », comme à la journée Tremplin :)), dans quel sens tu l’entends?

      • Tu as bien compris le message caché derrière mon « affreux libéral » de la journée de l’EERV. Comme tu le dis plus haut, les qualificatifs sont utilisés comme insultes théologiques. J’ai donc mis moi-même l’affreux pour montrer combien je trouve absurde ces étiquettes.

        D’un point de vue théologique, je ne me suis jamais considéré comme libéral. Mais je sais que plusieurs personnes me qualifient gaillardement comme tel dès que je critique leurs positions. Cela m’a été rapporté plusieurs fois et j’en ris volontiers.

        Pour les « évangéliques », les « conservateurs » (ce n’est pas moi qui les qualifie ainsi), libéral semble vouloir dire quelque chose comme « mou du genou » ou « moralement faible ». Mais jamais libéral au sens du libéralisme théologique du XIXe siècle. 

        Si être libéral, c’est refuser une lecture littérale de la Bible, ne pas se considérer comme un exemple moral de vie et accepter la théologie académique, je le suis probablement.

        Concernant la théologie libérale (au sens XIXe), j’ai une vraie sympathie pour ce mouvement parce qu’il revendique son côté intello, culturel et éthique. Et je trouve que les affirmations d’Évangile et Liberté (sa « confession de foi ») sont intéressants et pas « mou du genou » du tout: 

        Par souci de vérité et de fidélité au message évangélique, nous affirmons :

        - la primauté de la foi sur les doctrines,
        — la vocation de l’homme à la liberté,
        — la constante nécessité d’une critique réformatrice,
        — la valeur relative des institutions ecclésiastiques,
        — son désir de réaliser une active fraternité entre les hommes qui sont tous, sans distinction, enfants de Dieu.

        J’ai l’impression que ces principes sont très réformés et de puissants aiguillons contre une dérive tentante de faire de l’institution une finalité. Comme si l’EERV, l’EREN, ou je ne sais quelle Église était le Royaume de Dieu.

        Je suis protestant réformé « classique », mais j’aime beaucoup ce texte http://www.theolib.com/foi.html 🙂

  • Merci de m’accueillir sur ton blog. Oui, un blog est en quelque sorte une maison, parfois commune, alors je fais attention de ne pas jouer le troll ! 

    Je me permets de poster un commentaire car je suis l’un des deux-trois twittos dont tu parles au début de ton billet, aussi je poursuis le tutoiement accepté sur ce réseau social! Je n’ai pas été surpris par ton twitte mais je partage la première réaction de Nicolas, les mots méritent d’être mieux définis. Par exemple, une théologie « critique » ne produit pas les mêmes effets qu’un intégrisme religieux. Ce n’est pas non plus ce que tu écris. Après relecture, je pense que ton billet ne répond pas à l’édito qui a été écrit dans un contexte particulier. Comme ton billet appelle à la réflexion théologique, tu confirmes en quelque sorte ce à quoi voulait aboutir Raphaël Picon. Face à la bêtise en matière religieuse, écoutons aussi des théologiens. C’est le même qui a fait paraître « Tous théologiens » il y a quelques années. Pour le dire autrement, dans une société sous l’emprise d’un intégrisme religieux, tu serais privé de la liberté d’animer ce blog.

    Tu poses un autre débat, tout aussi passionnant. Si un « libéral » prétend avoir la meilleure réponse, est-il encore un libéral ?! Quels sont les présupposés méthodologiques de chaque théologie ?
    Les commentaires de Nicolas sont aussi très justes et tous les deux ouvrez de nombreuses fenêtres.

    Quelques rapides remarques qui se veulent des pistes de réflexion pour poursuivre :
    — L’appellation « théologie libérale » pose question aujourd’hui, le siècle d’où elle est issue commence sérieusement à s’éloigner. Le terme est souvent incompris en France car confondu avec le néolibéralisme économique. Le libéralisme théologique a conduit certains au christianisme social, d’autres au conservatisme moral, d’autres encore aux deux ! Il y a donc lieu peut-être de distinguer une théologie libérale, d’une morale libérale, d’un comportement libéral, etc.
    — En Amérique du nord, on utiliserait plutôt le terme « progressiste » pour qualifier des théologiens francophones se déclarant libéraux.
    — La théologie est en pleine recomposition, à l’image de la société et c’est une tautologie si l’on considère que la théologie est une tentative de décrire l’ultime avec les mots d’aujourd’hui pour les hommes d’aujourd’hui. Peut-être que les catégories d’hier méritent d’être revisitées, le spectre de la pensée théologique est plus large que l’opposition classique libéralisme-orthodoxie.
    — Il n’en demeure pas moins que l’honnêteté intellectuelle nous impose de ne pas avancer masqué et de ne pas verser dans la confusion et l’amalgame. Pour paraphraser Castellion, nous doutons, nous croyons, nous ignorons et nous savons, qu’est-ce qui nous divise et qu’est-ce qui nous rapproche ? Il est bon de situer d’où l’on parle et de ne pas nier les différences et les conflits d’interprétation.

    Merci encore de m’accueillir sur ce blog. Je vais m’empresser de faire partager ces conversations en comité de rédaction d’Evangile & liberté. Peut-être aurons-nous un jour l’occasion de nous rencontrer dans le monde réel. Fraternellement,

  • Cher homonyme,

    Tu es le bienvenus sur ce blog. Merci pour ces remarques riches et stimulantes, et surtout pour le ton constructif de la discussion!

    C’est vrai que la théologie « critique » ne produit pas les mêmes effets qu’un intégrisme religieux. Mais deux intégrismes religieux différents ne produisent pas non plus exactement les mêmes effets. Cela ne veut donc pas encore dire que la théologie critique n’est pas (parfois) intégriste. Si mon blog n’est pas censuré, j’ai connu une forme de censure à l’université. Ce qui me fait dire que si la théologie « critique » devenait le discours majoritaire et gagnait de l’influence dans la société, celle-ci ne serait pas forcément meilleure — du moins plus libre — que sous un intégrisme religieux qui aurait la même influence. La différence serait les ensembles de valeurs et axiomes imposés qui délimitent l’espace de liberté accordé. Je parle ici de la théologie « critique » et « scientifique » que je connais, qui n’est pas nécessairement d’inspiration majoritairement libérale (je mentionnais le terme « libéral » parce qu’il est utilisé comme insulte dans certains milieux conservateurs de la même manière que « fondamentaliste » est utilisé dans les milieux progressistes—les deux sans réelles référence ou même connaissance du libéralisme ou fondamentalisme théologique).

    Il suffirait pourtant pour éviter cela que la théologie « critique » situe d’où elle parle avec honnêteté (comme tu le dis). Elle pourrait devenir ainsi, peut-être, critique (sans guillemets). Accessoirement, cela ne s’applique pas uniquement à la théologie « scientifique », mais d’une certaine manière à la science en générale (cf. par exemple les remarques cinglantes de Feyerabend).

    Malheureusement, je connais personnellement trop peu de théologiens libéraux pour mieux comprendre de l’intérieur la passion qui vous anime. Mais cela est entrain de changer, et j’en suis ravi! J’ai encore beaucoup à découvrir, j’espère donc que la conversation se poursuivra.

    Merci.

  • Intéressante conversation comme peut en offrir Internet. Je manque souvent de temps à consacrer à la théologie mais nous avons la vie devant nous ! Pour découvrir des théologiens libéraux, comme tu sembles lire l’anglais sans problème, tu auras plus de possibilité que moi.
    Je vais creuser tes remarques sur le vocabulaire car, en en effet, les mots « critique », « fondamentaliste », « libéral », « progressiste », « orthodoxe » n’ont pas le même sens selon son Eglise, le pays d’où l’on parle, etc.

    Dans le dernier numéro d’Evangile & liberté (décembre 2012), Gilles Bourquin, théologien suisse, a écrit le cahier central: « Pertinences des théologies libérales dans les mutations en cours ».
    Il dit mieux que moi ce que je voulais dire en partie dans mon premier commentaire.

    A bientôt sur ton blog ou ailleurs…

  • Cher Olivier,

    Je voudrais vous remercie pour votre texte et pour votre mémoire. Je suis très intéressé dans l’ouvre de Michael Polanyi. Probablement, je vais il utilise dans ma recherche. Pouvons-nous parler pour e‑mail? Nous pouvons échanger des informations. 

    Fraternellement,

    André Geske

  • Bonsoir à vous tous!

    Je trouve stimulantes vos réflexions autour de la théologie, de son rapport avec les (impensés des) sciences, et l’épistémologie. En effet, s’il y a une naïveté « litteraliste », il y a aussi une naïveté certaine de ceux qui se disent critiques. Peut-etre que la « Sainte ignorance » de Olivier Roy est la chose partagée à leur insu par les uns et les autres, d’où leurs invectives réciproques…
    Les échanges lus ici me donnent de l’espoir:serait-on sur le chemin d’une pratique de la théologie qui écoute ce qui est autre qu’elle-même? Et pas dans le but de lui répondre par des arguments « vrais », enfin définitifs, mais par ce que la parole dite à… par.… n’est vraie que lorsqu’elle se tient hors de la violence qui dénigre la parole de l’autre.
    Çà n’enlève rien à l’exigence de rigueur, ni à la prétention à savoir quelque chose de façon certaine,mais peut-être cela vient-il casser l’illusion que l’on parle depuis une position de savoir vrai et universel.
    C’est le risque de tous les métalangages: savoir avant que l’autre parle qu’il va tenir un langage forcément partial, situé ou non-vrai ( ça dépend du « savoir  » sur lequel s’appuie le métalangage). Au fond, attribuer à l’autre discours une place que notre théorie sait et définit d’avance.
    Là, personne ne prend de risque ni ne s’expose: au cœur du dialogue il n’y a personne, un peu comme ces « débats » dans les médias où les arguments s’opposent, mais rien ni personne n’est altéré par l’échange.
    Ce que vous appelez théologie symphonique me semble aller vers quelque chose de meilleur: au cœur du discours, il y a écoute de l’autre (tout comme dans un orchestre la qualité de la musique est meilleure si les musiciens s’écoutent tout en jouant des partitions différentes). Maurice Bellet, dans toute son œuvre me semble également chercher une voie semblable.
    Alors merci à vous tous!
    Joyeuses Pâques!

  • Coucou Olivier,

    Je lis avec plaisir chaque post de ton Blog et ta réflexion m’émerveille et me nourri ! C’est un incroyable plaisir !
    Du coup je reviens aussi (mais on pourra sans autre en parler plus à HolyGames) sur la définition de théorie/théologie critique. Ça serait quoi pour toi la critique ?

    En fait, je me dis que si aujourd’hui on a la possibilité de critiquer, avoir une opinion différente ou, comme l’a dit Anthony Feneuil dans mon cours de Systématique/Dogmatique au Séminaire de Culture Théologique de Cèdres formation « laisser toujours et incessamment la place à l’opposition », si on a ça c’est grâce à la pensée critique et démocratique qui laisse la place et la parole à tout le monde ! 

    C’est à dire : si aujourd’hui la liberté d’expression et d’opinion existe, c’est grâce à la possibilité d’une critique et c’est par elle que chaque personne peut s’exprimer et dire ce qu’elle pense sur une théorie ou sur l’autre. Aujourd’hui il est par exemple possible d’écrire un livre en essayant de prouver que la force de gravité n’existe pas sur terre, que c’est un monstre au centre de la terre qui nous attire avec des forces invisibles vers lui. Cela n’assure pas un succès de ventes mais c’est possible.

    Pour moi c’est ça le défi du pluralisme confessionnel, religieux et moral d’aujourd’hui : comment faire vivre ensemble deux explications de la réalité et de la vie et du sens qui sont foncièrement opposées ? Et surtout comment le faire lorsque une des deux se promet philosophiquement de supprimer l’autre si elle en vient à être dominante ?

    C’est à dire : il y a une pensée aujourd’hui qui, par définition et dans son coeur, veut supprimer toute pensée critique et se pose en pensée unique, hégémonique et définie par les dominant·e·s. Elle est aujourd’hui minoritaire mais si elle prendra le pouvoir, elle supprimera avec la force toutes les critiques, c’est dans son essence même (Russie, Chine, etc.). Et elle les supprimera pas à force de débat mais manu militari.

    Il y en a une autre qui par définition s’oblige à laisser encore et toujours la place à la critique, au débat, à l’opposition et à la remise en question, elle laisse donc toujours la porte ouverte à une nouvelle découverte, à une réforme, à la remise en question par exemple de la théorie de la relativité, qui permet la découverte de la physique quantique et qui sait, demain, d’une autre physique plus précise encore. 

    Celle ci, qui est majoritaire aujourd’hui dans les différents domaines scientifiques, peut paraitre de facto une pensée hégémonique qui activement essaie d’effacer et d’ostraciser celleux qui ne pensent pas comme elle, mais en réalité jamais dans la définition de la théorie critique, de la déconstruction ou de la méthode scientifique pure c’est écrit « dès qu’une vérité est découverte elle est vraie pour toujours et jamais sur terre ou dans l’univers elle sera modifiable » ou « toute pensée qui n’est pas critique est à supprimer avec tout moyen possible ». 

    La preuve : les terraplatistes existent encore aujourd’hui et la seule manière avec laquelle on essaie de les faire réfléchir c’est le débat d’idée et d’arguments, pas une suppression de leur existence. 

    En ce sens : quel modèle de société serait adapté à notre monde d’aujourd’hui quand un groupe de personnes dit « nous on a raison et si vous nous croyez pas vous irez à l’enfer, il faut qu’on impose notre point de vue à tout le monde » en se fondant sur une philosophie unique et universelle et un autre dit « toute personne est acceptée telle qu’elle est, toute personne a le droit à une pensée autonome et toute critique, opposition ou idée est la bienvenue pour nous faire avancer vers plus de vérité » ?

    Je me réjouis d’en discuter avec toi !

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