Après un rapide séjour en Inde, j’ai observé des mouvement de libération à plusieurs niveaux. Il me faut encore un peu de temps pour digérer tout cela et parler des aspects libérateurs les plus important. En attendant, voici deux petites découvertes qui m’ont fait plaisir, et ont confirmé une de mes intuitions de base concernant le logiciel libre.
PS: j’écris depuis la Corée du Sud, doucement bercé par les ronflement de Jorge, et en essayant de taper au clavier le plus délicatement possible pour ne par réveiller Markus. Plus sur GETI bientôt, sûrement.
Dans la vie, il y a deux catégories de logiciels: les logiciels libres, et les logiciels privateurs (i.e. qui privent l’utilisateur de liberté)1. Selon une définition largement répandue, un logiciel est dit libre s’il garant à l’utilisateur les 4 libertés suivantes:
- Liberté d’exécuter le programme
- Liberté d’examiner le code source du programme (ce qui serait l’équivalent de pouvoir examiner la recette et les aliments utilisés en allant au restaurant) et de l’adapter à ses besoins (ce qui serait l’équivalent de transformer la recette)
- Liberté de redistribuer des copies du programme (gratuitement ou les vendre)
- Liberté d’améliorer le programme et distribuer ces améliorations au public, pour en faire profiter à tous.
Note: libre ne veut pas nécessairement dire gratuit2. Il existe différents modèles économiques profitables à base de logiciels libres. En fait, tout le monde utilise tout les jours sans le savoir quantité de logiciels libres (quantité de logiciels privateurs aussi, malheureusement), et tous les grands noms de l’informatique investissent dans le libre (Google, IBM, Facebook, Apple, Microsoft, etc.).
Il y a différentes raisons pour utiliser des logiciels libres. Certains diront que c’est plus rentable (puisque le développement est collaboratif: chacun améliore un peu et tout le monde en profite), d’autres que c’est plus sûr (puisqu’on peut savoir ce que fait réellement le programme, contrairement aux logiciels privateurs), d’autres que c’est plus fiable (le développement peut être très réactif, et les bogues rapidement corrigés), d’autres que c’est plus pérenne, etc. Soit.
La raison majeur qui me pousse à utiliser et prôner le logiciel libre même s’il n’y a pas que des avantages techniques est avant tout éthique: le logiciel libre est plus juste et charitable. En fait, il me semble même que l’utilisation de logiciels libres est la seule option viable dans une planète où les ressources sont limitées et où des lois immondes restreignent les évolutions technologiques pour empêcher volontairement un partage de connaissances qui ne coûte quasi-rien, et peut s’avérer salutaire.
Autrement dit, le logiciel libre est à l’informatique ce que le commerce équitable est à la consommation. (Pour une argumentation un peu plus détaillée, voire ici, en attendant mieux.)
Lors de mes pérégrinations en Inde, je découvre différentes voies magistrales par lesquelles une œuvre de libération est en marche — j’en parlerai peut-être dans d’autres articles. Concernant la liberté informatique, j’ai eu l’heureuse surprise, en visitant une école puis une église, de voir que les deux utilisaient du logiciel libre.
1. Liberté à l’école
Cette école accueille plus de 1000 étudiants, dans des classes de 50 à 80 élèves. Elle s’efforce de garder les frais d’écolage le plus bas possible pour qu’un maximum d’enfants puissent bénéficier d’une éducation de qualité. À cause de cela, le salaire des enseignants n’est pas glorieux, et beaucoup se font attirés dans des écoles plus riches qui ne visent pas à offrir une chance aux plus défavorisés. Dans ce contexte, chaque Roupie est important.
En particulier, pourquoi payer pour quelque chose qui peut se copier à un prix insignifiant?
L’école utilise donc Ubuntu comme système d’exploitation, une distribution basée sur Linux — probablement la plus célèbre et la plus simple à utiliser. (Comme toutes les distributions Linux, vous pouvez la télécharger gratuitement, la copier sur un clé USB et l’essayer sur votre ordinateur sans l’installer.) Une décision raisonnable.
Quand on utilise du logiciel privateur à l’école (par exemple Apple), tout l’argent investit va engraisser une firme américaine. Et chaque école qui paie pour le même logiciel va rendre ladite firme un peu plus riche, et c’est tout.
Si on utilisait du logiciel libre, tout l’argent investit irait dans l’augmentation de qualité d’un contenu accessible publiquement. C’est à dire que si une école a de l’argent à investir, toutes les autres écoles bénéficient des améliorations, y compris les écoles des pays en développement. On contribue à enrichir l’ensemble de la population, tout en partageant nos ressources.
2. Liberté à l’Église
En allant participer au culte d’une Église à Udaipur (qui est aussi un centre de formation et de conférences pour pasteurs), j’ai eu le plaisir de voir que l’équipe de louange utilisait le logiciel libre OpenLP. Son interface est moche et peu intuitive (pour l’instant), mais il fonctionne bien, et il est libre. Ce serait vraiment bête qu’une Église comme ça doive investir de l’argent pour un logiciel (il y a tellement d’enjeux plus urgents ici), mais elle peut pleinement bénéficier du travail des églises qui ont le luxe de développer de tels logiciels. Et qui sait, les indiens étant ce qu’ils sont, peut-être à l’avenir y contribuer.
Là aussi, chaque fois que l’on met de l’argent dans un logiciel privateur (par exemple Psalmo) on donne de l’argent à son concepteur seulement et personne d’autre n’en profite3. Par contre lorsque l’on utilise (et améliore: par des rapports de bogues, des traductions, des améliorations, des dons) un logiciel libre, l’église entière en bénéficie (et le monde entier, en fait).
Le logiciel libre est à l’informatique ce que le commerce équitable est à la consommation.
Pour utiliser l’informatique de manière responsable au 21e s., libérez-vous !
- Bien sûr, les choses sont plus complexes que cela (Dans la vie, il y a deux types de catégorisations: celles qui simplifient à tort en deux, et celles qui sont plus subtiles.). Il existe plusieurs définitions de la liberté de l’utilisateur devant un logiciel, et différentes licences qui suivant les définitions sont libres ou non. Cf. wikipedia. ↩
- En anglais, la confusion est facile puisque l’on parle souvent de Free software. On précise alors « Free as in free speech, not free beer. » ↩
- Pour le cas de Psalmo, je suis partagé: c’est mon voisin et c’est un type génial. ↩
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